Et voilà, me voici de retour avec les Belges dans mon cœur ! Mais avant de raconter ce voyage précis, je remercie tous ceux et celles qui m’ont écrit ainsi que les lecteurs qui ont continué de visiter mon blog, malgré ma longue absence… Cependant, entre mes allées et venues ici et là, je n’ ai pas cessé de regarder, d’ écouter, d’ interroger pour enrichir mes informations et ma propre analyse sur toutes ces crises financières, krach boursier, et ces scandales qui sont en train de gangréner le capitalisme pur et dur à la Bush, Sarkozy, Merkel, Berlusconi & consorts ! Et, je me demande toujours, jusqu’ à quand ces ignominies vont-elles durer sans réaction forte des populations??
Mais aujourd’ hui, juste pour un instant, je vous invite à oublier les ombres malfaisantes, pour entrer dans l’ espérance...
***
« Nous avons des frères derrière cette étendue. Des frères bons. Ils nous aiment. Ils nous regardent et pleurent...Salut à qui partage avec moi l’attention à L’ivresse de la lumière, la lumière du papillon, dans La noirceur de ce tunnel. » - Etat de siège, poème inédit de Mahmoud Darwich - -Ramallah janvier 2002.
***
Oui, salut et honneur à ce beau pays dont il est difficile de ne pas succomber à son charme, qui est le premier, sinon le seul en Europe à avoir dédié toute une grande saison culturelle, durant 2 mois, à la Palestine !
En effet, vous avez bien lu ! La Palestine, dont la seule évocation fait craindre, dans certains pays d’Occident, à un suicide professionnel ou politique… C’est dans ce contexte mondial de « crise » économique, où "l’ humanisme rapace" des gouvernants voyous est en train de faire les pires dégâts de l’ humanité , où le droit international et la justice sont devenus les grandes muettes du temps présent, que la Communauté française Wallonie-Bruxelles a généreusement offert cet espace à la liberté d’ expression et de création artistique palestinienne.
Ce projet pionnier en Belgique et unique en Europe a été réalisé sous le haut patronage de la Ministre des Relations Internationales de la Communauté Française, du Comité Palestinien sous la présidence du poète palestinien récemment disparu Mahmoud Darwich– de Leila Shahid, ambassadrice de l’Etat (n’en déplaise à certains !) Palestinien, avec le soutien de la Ministre de la Culture, et celui de Jeannette Mickhail, Maire de Ramallah. Le tout, mené à tambour battant sous la férule dynamique de la Commissaire Fabienne Verstraeten, Directrice des Halles de Schaerbeek.
***
Un évènement aussi ambitieux que courageux, qui reflète l' éthique morale et l' humanisme de ce cœur de l’ Europe qu’ est la Belgique, dans le prisme de ses nombreux artistes, de Maeterlinckde, Michaux, Simenon, en passant par Brel, Nothomb et Geluck. Flamands ou Wallons.
*** En vérité, la volonté belge de donner la parole aux artistes palestiniens, est bien la démarche d’une grande nation où la culture est la raison de la paix, car elle nous invite à la connaissance d'autrui et féconde la tolérance, en nous incitant à partir à la rencontre d'autres imaginaires et d'autres cultures. Ici, Masarat Palestine qui dans la langue arabe signifie – parcours, itinéraires – c’est l’expression de toute une nouvelle génération d’artistes urbains, des collectifs de jeunes graphistes, des photographes et vidéastes, de musiciens, de cinéastes et d’écrivains. Tous et chacun à sa manière, nous ont fait passer par toutes les palettes de l’émotion. Cinéma, littérature, poésie, musique, conférences, débats et tables rondes ont essaimé leurs voix de Bruxelles, à Charleroi,Liège, Mons et Namur.
*** Ainsi, l’ 'inauguration de la saison culturelle "Masarat Palestine " aux Halles de Schaerbeek a-t-elle été un hommage au poète disparu Mahmoud Darwich, à travers les témoignages et discours de personnalités qui lui ont été proches, tels ses amis écrivains, Edouard Glissant, Breyten Breytenbach, Juan Goytisolo, Elias Khoury, Elias Sanbar, Sukhair, Farouk Mardam-Bey, etc.… Mais aussi, des rencontres-débats, « Conversations d’Ici et de Là-bas » entre Adila Laidi-Hanieh* et Catherine David* ; Jean-Luc Godard et Elias Sanbar* ; Plantu*, Baha Al Boukhari* et Pierre Kroll*, etc.
*** Sans prétendre faire un reportage exhaustif sur Masarat-Palestine, je voudrais simplement citer au hasard de ma mémoire, quelques phrases des discours qui m’ont particulièrement émue par le ton et le sens de leur message… Comme par exemple, celles qui vont suivre.
Adila Laidi-Hanieh, première directrice du Centre culturel Khalil Sakakini, dans lequel Mahmoud Darwich avait son bureau où il écrivait pour la revue littéraire « Al Karmel » qu’ il dirigeait, et y recevait ses nombreux amis qui le visitaient. Elle rappellera l’héritage humaniste que le poète aura laissé à son peuple comme « un viatique existentiel » pour y puiser les raisons de l’espérance, à travers la joie, l’humour et l’amour de la vie, dans la citation de ces vers du Poéte:
"Nous aimons la vie autant que possible
Nous volons un fil au ver à soie pour tisser
Notre ciel clôturer cet exode
Nous ouvrons la porte du jardin
Pour que le jasmin inonde les routes comme une belle journée Nous aimons la vie autant que possible… »
***
Et ici, Elias Sanbar, celui qui a donné une « voix française » à Darwich, son ami, son traducteur quand avec toute l’émotion contenue dans les larmes et les mots il dit : « Ses poèmes sont devenus mon pays, Haïfa… son dernier recueil encore sous presse «La Trace du Papillon » exprime tout son amour à la vie… Il disait que l’exil est généreux, car à travers lui, nous avons trouvé notre humanité »…
***
Avec cet autre complice et ami, le grand écrivain libanais, Elias Khoury* :
« … Mon poète était différent, il savait qu’il avait deux muses, le pays et l’amour, et que la poésie a le pouvoir de créer le langage de la vulnérabilité et d’inventer l’espace de l’imagination. Mon poète était timide: même dans sa poésie de la maturité quand il pouvait emprunter le cheval d’Oumrou’u al Kaiss, s’approprier Al Mountanabi… Écrire l’histoire de la tragédie palestinienne, il continuait à être l’enfant d’un paysan palestinien, et la voix de la quête humaine de l’amour et de la dignité. Mon poète jouait avec la mort, et quand il eut gagné la bataille par l’écriture, il mourut. Quelle bataille est-ce donc là? On gagne pour perdre, et quand on perd on devient part du livre éternel de la poésie?
Je n’aime pas accompagner mon poète à travers la mort qui nous parle à texte ouvert. Je préfère le garder avec moi et respirer la douceur des fleurs de citronnier dans la musique de sa poésie et l’eau qui atténuait ses mots, voyageant avec lui vers sa/ma Palestine, un pays recréé par les mots. Il y a trois ans, à Mantoue, en Italie, j’ai essayé de lui dire qu’il était mon poète personnel, mais il ne m’a pas pris au sérieux. Nous participions à une discussion à propos de nos œuvres littéraires. Mahmoud Darwish était venu présenter Mural. Pour adoucir la mélancolie, j’ai dit qu’au cours de ma jeunesse, j’avais beaucoup appris sa poésie par cœur pour des raisons pratiques, car je l’utilisais pour séduire les filles et cette méthode rencontrait un certain succès. Je n’ai pas dit alors que je connais toujours sa poésie par cœur, pour les mêmes raisons et pour d’autres aussi, qui ont à voir avec les vies des personnages de mes propres romans, car je ne peux imaginer mes personnages sans la poésie qui leur permet de supporter la vie. L’auditoire a ri, puis Darwish a demandé au public de ne pas me croire, puisque nous étions de la même génération.
Cette même nuit, Melia, l’héroïne de mon roman ‘Comme si elle dormait’, qui se déroule à Nazareth en 1947, m’est apparue en rêve. Melia dit à son époux Mansour: Demain, mon chéri, quand il y aura 50 ans qu’un grand Poète est né dans ce pays, vous saurez tous que vous ne gagnerez pas la guerre, si ce n’est par le Verbe qui est plus fort que les armes’. Melia, le Poète est venu et il est mort samedi 9 août 2008. Ont-ils découvert ce que tu voulais qu’ils sachent? »
***
Puis vint, ce palestinien de "l' intérieur" de Jérusalem, Mahmoud Shukair*, cette attachante personnalité, avec le sens de la dérision des choses de la vie, l' humilité élégante et la finesse de l' esprit des " vrais" écrivains-poètes! Il a su nous rendre la présence envoûtante de Mahmoud Darwich, dans toute la splendeur de sa Vérité humaine. Se détachant de toute dialectique intellectuelle, Il nous le raconta si sobrement, avec des mots simples qui naissaient du coeur, que je ne résiste pas au plaisir de vous les livrer entièrement:
«Cette soirée à Bruxelles possède un goût particulier.
Depuis que Mahmoud Darwich nous a quittés, nous n’avons cessé de l’évoquer, d’écrire des articles et des poèmes en son honneur, d’organiser des séances d’hommage pour exprimer notre chagrin, d’évoquer son immense génie poétique et son extrême délicatesse dans la vie de tous les jours. Il est vrai que nous sommes extrêmement affligés pour sa soudaine disparition. Ce soir, notre affliction est encore plus grande parce que Mahmoud Darwich était à la tête de l’équipe qui avait organisé la saison culturelle palestinienne en Belgique. Il avait présidé le comité palestinien Masarat qui avait travaillé main dans la main avec les Belges pour réussir cet événement.
Un récital poétique de Mahmoud Darwich était prévu pour inaugurer ces activités. Il l’avait désiré et le prévoyait avec enthousiasme, mais ses artères avaient failli et ne lui avaient pas permis d’arriver jusqu’à ce jour.Aujourd’hui, s’il avait été avec nous, la joie de Leila Shahid, l’Ambassadrice de la Palestine auprès de l’Union européenne et l’amie du peuple belge, aurait été totale. Depuis un an, elle avait mis tout en œuvre pour que le succès couronne cette saison. S’il avait été avec nous, la joie de Fabienne Verstraeten aurait été totale, elle qui versait de chaudes larmes avec le peuple palestinien chaque fois qu’il encaissait un revers. Elle avait travaillé d’arrache pied pendant toute l’année écoulée afin de construire plus de ponts d’amitié et de collaboration entre les peuples belge et palestinien, concrétisant l’un des grands thèmes chers à la poésie de Darwich, qui ne tiennent compte d’aucune frontière, genre ou nationalité et qui s’adressent à l’être humain avec ses désirs, ses aspirations, ses soucis et ses espoirs, partout où il se trouve.
Je me souviens des derniers jours de Mahmoud Darwich et je me souviens de sa dernière réunion à Ramallah avec le comité Masarat, chez Adila et Akram.
Il était lumineux comme à son habitude, le visage souriant, l’esprit vif, émaillant la réunion de blagues et de rires. Et comme à son habitude, il s’était distingué par la logique de son argumentation, par sa faculté d’écoute et par sa compétence à extraire la substantifique moelle de l’ensemble des idées que proposaient les femmes et les hommes réunis. Je me souviens de sa dernière rencontre avec Mme la Ministre Marie Dominique Simonet. Il était arrivé au rendez-vous avant l’heure prévue, afin de pouvoir l’accueillir en compagnie de Mme Leila Shahid et des membres du comité Masarat. La saison culturelle dont Darwich est absent aujourd’hui, fut le principal sujet de conversation entre le poète et la ministre, venue à Ramallah pour annoncer officiellement l’adoption de cette manifestation culturelle et pour nous faire part de la solidarité du peuple belge avec la Palestine et son peuple. Ce jour-là, Mahmoud Darwich rayonnait de vivacité et de charisme, comme à son habitude.
Je me souviens de son dernier récital poétique au Palais de la Culture à Ramallah, quarante jours avant sa disparition, à l’occasion de la célébration par la ville du centenaire de la première mairie. À l’entrée de Mahmoud dans la salle, la foule innombrable s’était levée comme un seul homme en hommage au poète qui avait modelé la conscience palestinienne pendant cinq décennies, l’exprimant de la meilleure façon qui soit, au poète qui avait magnifié de manière exceptionnelle l’identité nationale et culturelle du peuple palestinien. Au cours de ce récital, Mahmoud Darwich avait prouvé qu’il était sans cesse capable de dépasser son acquis poétique, d’étonner le public avec de magnifiques poèmes qui exprimaient de manière originale son expérience de vie, en élargissant l’espace de la vision, en multipliant les possibles, en recourant à l’humour qui attire l’attention sur notre vulnérabilité et renouvelle notre sensation de vie. Dans les derniers poèmes qu’il avait lus devant une foule innombrable, nous avons pu déceler de précieuses innovations dans son parcours poétique, telles le recours à certains aspects autobiographiques et à quelques souvenirs qui enrichissent ses liens avec l’espace palestinien, une réflexion profonde sur la mort et sur la vie, des questions qui ouvrent la voie à la méditation à partir les détails les plus infimes de la vie quotidienne pour un envol vers un espace infini. Au cours de ce récital, Mahmoud Darwich avait brillé, comme à son habitude, surprenant les penchants esthétiques de son auditoire, relevant toujours un peu plus l’espace qu’occupait la littérature en général et la poésie en particulier dans la vie des gens. Au cours de ce récital, la place de Darwich s’est trouvé de nouveau raffermie dans le coeur des gens, comme s’est confirmé de nouveau sa présence comme symbole, faisant battre à l’unisson nos sentiments, les exaltant dans un moment unique et rare d’élévation qui nous permet de transcender la misère, la confusion et l’indétermination de notre vie, de regarder l’avenir avec un tant soit peu d’optimisme et d’espérance.
Pourtant, la disparition soudaine de Mahmoud Darwich s’est abattue sur nous comme une véritable catastrophe au mauvais moment. Mahmoud est décédé. Il avait honoré la ville de Ramallah en y résidant, lorsque les autorités de l’occupation israélienne lui avaient concédé un retour tronqué. Mahmoud est décédé. Il ne montera plus les marches de l’immeuble Sakakini où était son bureau. Il ne feuillettera plus les journaux dans le bureau qui l’avait accueilli pendant des années. Il ne boira plus du café en achevant un travail pour la revue « al-Karmel » qu’il dirigeait. Il ne répondra plus aux appels téléphoniques, il ne recevra plus ses amis avec affabilité et courtoisie avant de s’engager avec eux dans de longues conversations sur notre situation actuelle et sur nos peines. Il avait alors du temps pour parler de poésie, de romans, de nouvelles ou des dernières parutions. Il avait alors du temps pour l’humour, car Mahmoud était le maître des plaisanteries, le prince de la verve. Il avait alors du temps pour le rire et ses yeux brillaient derrière ses lunettes, son visage s’illuminait. Hélas, cette savoureuse simplicité n’est plus possible. Désormais, elle n’est plus possible, cette promenade quotidienne qu’il faisait en solitaire ou en compagnie de ses amis, dans les rues de son quartier, obéissant aux conseils des médecins qui lui avaient prescrit la marche pour éviter l’incident cardiaque. Il ne lui est plus possible de contempler les arbres, les femmes ou le linge sur les balcons. Il ne lui est plus possible de voir le soleil tomber à l’heure du couchant du côté de son village natal, de jouir de la brise qui se lève doucement, malgré la colonie étrangère qui pèse de tout son poids sur le sommet de la montagne, à proximité.
Avec sa disparition bouleversante, nous avons perdu une immense figure poétique et humaine. Nombreux sont ceux qui le regretteront : parents, amis, intellectuels et gens ordinaires. De nombreuses villes le regretteront aussi : Haïfa, Ramallah, Amman, Beyrouth, Damas, Tunis, le Caire, Alger, Casablanca, ainsi que de nombreuses villes arabes ou étrangères où il s’était promené, dans leurs cafés, il s’était assis, dans leurs salles, il avait lu ses poèmes. Il manquera à Jérusalem sur laquelle il avait tant écrit sans avoir l’opportunité d’y vivre. Il manquera au village d’al-Birweh, dont les terres confisquées et les décombres languiront pour cet enfant du pays qui avait immortalisé son nom et celui de la Palestine dans de nombreux poèmes qui passeront l’épreuve du temps. Il manquera aussi à la ville de Bruxelles qui l’avait tant attendu. Il nous manquera à tous, sa disparition cruelle marquera un grand vide au fond de nous. "»
***
Mais ce soir-là, tel le Christ Ressuscité par la ferveur de ses fidèles, le Poète était revenu, dans toute la plénitude de son âme, pour marquer le sceau de son verbe immortel au fond de chacun de nous… Il était là, plus vivant que les vivants dans le récital palestinien du fabuleux trio Joubran. Ces trois frères, Samir, Wissam et Adnan, avec leur magistrale improvisation sur leurs 3 oud (luths) exprimant toute la profondeur de l’extase et de la douceur. Leur musique dit à elle seule, ce que ni les mots, ni les gestes ne peuvent dire. Il faut absolument les voir, écouter et découvrir la virtuosité magique avec laquelle leurs doigts agiles font parler rire et pleurer leur instrument, pendant que derrière eux l’ image géante de Mahmoud Darwich avec sa voix puissante rythmait la musique avec son verbe toujours vivant, présent comme s’ il était là tout près de nous, de vous, de ce monde qu’ il n’ a pas, qu’ il ne quittera jamais, aussi longtemps que soufflera la palpitation d’ existence des peuples libres… et justes !
***
Cependant, je me dois d’ajouter que j’ai regretté l’absence de José Saramago, écrivain portugais, Prix Nobel de littérature, ami de Mahmoud Darwich et l’un des plus courageux défenseurs de la cause palestinienne. Sachant que la reconnaissance du talent, de la probité humaine et intellectuelle d’un écrivain, ne se mesure pas aux nombres de ses invitations aux manifestations culturelles dans le monde, Saramago demeure ce qu’il est : un grandiose écrivain et un JUSTE que Mahmoud Darwich et la Palestine ont déjà reconnu comme un des leurs.
***
Mais encore, j’ai plus déploré et condamné la défection des ambassadeurs arabes accrédités en Belgique en ce jour d’inauguration officielle de MASARAT-PALESTINE en présence du Premier Ministre palestinien Salam Fayyad ! Cette absence de solidarité des pays arabes avec le peuple palestinien m’a attristée… sans trop m’étonner dans le fond. Toutefois, comme l’a dit un jour, José Saramago : « sans eux la Palestine a déjà résisté 60 ans et résistera 60 années de plus s’il le faut …»
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A suivre, demain publication des photos...
Lien du site"MASARAT PALESTINE": http://www.masarat.be/publications/revue-ah.html
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* http://alaidi.blogspot.com/ Adila Laïdi–Hanieh : essayiste, et théoricienne de l’art et de la culture en Palestine et au Moyen-Orient, ancienne directrice du Khalil Sakakini Culturel Center à Ramallah, et actuellement professeur en pensée arabe et contemporaine à l’Université de Bir Zeit.(Palestine). Elle coédite avec la revue ah ! le numéro "Palestine. Rien ne nous manque ici." Ouvrage collectif, publié sous sa direction - Revue ah ! (Bruxelles) & Les éditions Cercle d’art (Paris)
*Catherine David est historienne de l’art, spécialiste de l’art du Moyen-Orient, curatrice et directrice artistique de manifestations et institutions telles que La Documenta X de Kassel, la Galerie Nationale du Jeu de Paume, Witte de With, le Festival d’Automne de Paris
*Mahmoud Shukair est né en 1940 à Jerusalem. Il est l’auteur de nombreux recueils de nouvelles et de livres pour enfants. La Revue d’Etudes Palestiniennes a publié quelques-unes des ses nouvelles. A lire absolument son dernier livre : " Ma cousine Condoleeza Rice et autres nouvelles » (Paris- Actes Sud/Sindbad)
*Elias Sanbar : né à Haïfa en 1947, est âgé d’un an quand sa famille est chassée de Palestine au moment de la création d’Israël (1948).Historien, essayiste, poète et militant de la cause palestinienne. En 1981, Elias Sanbar fonde à Paris, La Revue d’études palestiniennes dont il est le rédacteur en chef. Il a aussi participé à des travaux de cinéma, traduit des poèmes en français (notamment ceux de Mahmoud Darwich) et écrit plusieurs essais.
*Elias Khoury: né à Beyrouth en 1948, est un libanais romancier, dramaturge et critique. Il a publié près de dix romans, qui ont été traduits dans plusieurs langues étrangères, ainsi que de nombreux ouvrages de critiques littéraires. Il a aussi écrit trois pièces de théâtre. Il est actuellement rédacteur en chef du journal Al-Mulhaq, le supplément hebdomadaire du quotidien libanais Al-Nahar et est un intellectuel de renommée internationale. (http://fr.wikipedia.org/wiki/Elias_Khoury)
*Baha Boukhari, dessinateur satirique palestinien né en 1954 à Jérusalem
*Pierre Kroll : est un dessinateur et caricaturiste Belge né en 1958 à Gwaka en République démocratique du Congo
*Plantu: dessinateur satirique français, de son vrai nom, Jean Plantureux né en1951 à Paris
Mais aujourd’ hui, juste pour un instant, je vous invite à oublier les ombres malfaisantes, pour entrer dans l’ espérance...
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« Nous avons des frères derrière cette étendue. Des frères bons. Ils nous aiment. Ils nous regardent et pleurent...Salut à qui partage avec moi l’attention à L’ivresse de la lumière, la lumière du papillon, dans La noirceur de ce tunnel. » - Etat de siège, poème inédit de Mahmoud Darwich - -Ramallah janvier 2002.
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Oui, salut et honneur à ce beau pays dont il est difficile de ne pas succomber à son charme, qui est le premier, sinon le seul en Europe à avoir dédié toute une grande saison culturelle, durant 2 mois, à la Palestine !
En effet, vous avez bien lu ! La Palestine, dont la seule évocation fait craindre, dans certains pays d’Occident, à un suicide professionnel ou politique… C’est dans ce contexte mondial de « crise » économique, où "l’ humanisme rapace" des gouvernants voyous est en train de faire les pires dégâts de l’ humanité , où le droit international et la justice sont devenus les grandes muettes du temps présent, que la Communauté française Wallonie-Bruxelles a généreusement offert cet espace à la liberté d’ expression et de création artistique palestinienne.
Ce projet pionnier en Belgique et unique en Europe a été réalisé sous le haut patronage de la Ministre des Relations Internationales de la Communauté Française, du Comité Palestinien sous la présidence du poète palestinien récemment disparu Mahmoud Darwich– de Leila Shahid, ambassadrice de l’Etat (n’en déplaise à certains !) Palestinien, avec le soutien de la Ministre de la Culture, et celui de Jeannette Mickhail, Maire de Ramallah. Le tout, mené à tambour battant sous la férule dynamique de la Commissaire Fabienne Verstraeten, Directrice des Halles de Schaerbeek.
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Un évènement aussi ambitieux que courageux, qui reflète l' éthique morale et l' humanisme de ce cœur de l’ Europe qu’ est la Belgique, dans le prisme de ses nombreux artistes, de Maeterlinckde, Michaux, Simenon, en passant par Brel, Nothomb et Geluck. Flamands ou Wallons.
*** En vérité, la volonté belge de donner la parole aux artistes palestiniens, est bien la démarche d’une grande nation où la culture est la raison de la paix, car elle nous invite à la connaissance d'autrui et féconde la tolérance, en nous incitant à partir à la rencontre d'autres imaginaires et d'autres cultures. Ici, Masarat Palestine qui dans la langue arabe signifie – parcours, itinéraires – c’est l’expression de toute une nouvelle génération d’artistes urbains, des collectifs de jeunes graphistes, des photographes et vidéastes, de musiciens, de cinéastes et d’écrivains. Tous et chacun à sa manière, nous ont fait passer par toutes les palettes de l’émotion. Cinéma, littérature, poésie, musique, conférences, débats et tables rondes ont essaimé leurs voix de Bruxelles, à Charleroi,Liège, Mons et Namur.
*** Ainsi, l’ 'inauguration de la saison culturelle "Masarat Palestine " aux Halles de Schaerbeek a-t-elle été un hommage au poète disparu Mahmoud Darwich, à travers les témoignages et discours de personnalités qui lui ont été proches, tels ses amis écrivains, Edouard Glissant, Breyten Breytenbach, Juan Goytisolo, Elias Khoury, Elias Sanbar, Sukhair, Farouk Mardam-Bey, etc.… Mais aussi, des rencontres-débats, « Conversations d’Ici et de Là-bas » entre Adila Laidi-Hanieh* et Catherine David* ; Jean-Luc Godard et Elias Sanbar* ; Plantu*, Baha Al Boukhari* et Pierre Kroll*, etc.
*** Sans prétendre faire un reportage exhaustif sur Masarat-Palestine, je voudrais simplement citer au hasard de ma mémoire, quelques phrases des discours qui m’ont particulièrement émue par le ton et le sens de leur message… Comme par exemple, celles qui vont suivre.
Adila Laidi-Hanieh, première directrice du Centre culturel Khalil Sakakini, dans lequel Mahmoud Darwich avait son bureau où il écrivait pour la revue littéraire « Al Karmel » qu’ il dirigeait, et y recevait ses nombreux amis qui le visitaient. Elle rappellera l’héritage humaniste que le poète aura laissé à son peuple comme « un viatique existentiel » pour y puiser les raisons de l’espérance, à travers la joie, l’humour et l’amour de la vie, dans la citation de ces vers du Poéte:
"Nous aimons la vie autant que possible
Nous volons un fil au ver à soie pour tisser
Notre ciel clôturer cet exode
Nous ouvrons la porte du jardin
Pour que le jasmin inonde les routes comme une belle journée Nous aimons la vie autant que possible… »
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Et ici, Elias Sanbar, celui qui a donné une « voix française » à Darwich, son ami, son traducteur quand avec toute l’émotion contenue dans les larmes et les mots il dit : « Ses poèmes sont devenus mon pays, Haïfa… son dernier recueil encore sous presse «La Trace du Papillon » exprime tout son amour à la vie… Il disait que l’exil est généreux, car à travers lui, nous avons trouvé notre humanité »…
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Avec cet autre complice et ami, le grand écrivain libanais, Elias Khoury* :
« … Mon poète était différent, il savait qu’il avait deux muses, le pays et l’amour, et que la poésie a le pouvoir de créer le langage de la vulnérabilité et d’inventer l’espace de l’imagination. Mon poète était timide: même dans sa poésie de la maturité quand il pouvait emprunter le cheval d’Oumrou’u al Kaiss, s’approprier Al Mountanabi… Écrire l’histoire de la tragédie palestinienne, il continuait à être l’enfant d’un paysan palestinien, et la voix de la quête humaine de l’amour et de la dignité. Mon poète jouait avec la mort, et quand il eut gagné la bataille par l’écriture, il mourut. Quelle bataille est-ce donc là? On gagne pour perdre, et quand on perd on devient part du livre éternel de la poésie?
Je n’aime pas accompagner mon poète à travers la mort qui nous parle à texte ouvert. Je préfère le garder avec moi et respirer la douceur des fleurs de citronnier dans la musique de sa poésie et l’eau qui atténuait ses mots, voyageant avec lui vers sa/ma Palestine, un pays recréé par les mots. Il y a trois ans, à Mantoue, en Italie, j’ai essayé de lui dire qu’il était mon poète personnel, mais il ne m’a pas pris au sérieux. Nous participions à une discussion à propos de nos œuvres littéraires. Mahmoud Darwish était venu présenter Mural. Pour adoucir la mélancolie, j’ai dit qu’au cours de ma jeunesse, j’avais beaucoup appris sa poésie par cœur pour des raisons pratiques, car je l’utilisais pour séduire les filles et cette méthode rencontrait un certain succès. Je n’ai pas dit alors que je connais toujours sa poésie par cœur, pour les mêmes raisons et pour d’autres aussi, qui ont à voir avec les vies des personnages de mes propres romans, car je ne peux imaginer mes personnages sans la poésie qui leur permet de supporter la vie. L’auditoire a ri, puis Darwish a demandé au public de ne pas me croire, puisque nous étions de la même génération.
Cette même nuit, Melia, l’héroïne de mon roman ‘Comme si elle dormait’, qui se déroule à Nazareth en 1947, m’est apparue en rêve. Melia dit à son époux Mansour: Demain, mon chéri, quand il y aura 50 ans qu’un grand Poète est né dans ce pays, vous saurez tous que vous ne gagnerez pas la guerre, si ce n’est par le Verbe qui est plus fort que les armes’. Melia, le Poète est venu et il est mort samedi 9 août 2008. Ont-ils découvert ce que tu voulais qu’ils sachent? »
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Puis vint, ce palestinien de "l' intérieur" de Jérusalem, Mahmoud Shukair*, cette attachante personnalité, avec le sens de la dérision des choses de la vie, l' humilité élégante et la finesse de l' esprit des " vrais" écrivains-poètes! Il a su nous rendre la présence envoûtante de Mahmoud Darwich, dans toute la splendeur de sa Vérité humaine. Se détachant de toute dialectique intellectuelle, Il nous le raconta si sobrement, avec des mots simples qui naissaient du coeur, que je ne résiste pas au plaisir de vous les livrer entièrement:
«Cette soirée à Bruxelles possède un goût particulier.
Depuis que Mahmoud Darwich nous a quittés, nous n’avons cessé de l’évoquer, d’écrire des articles et des poèmes en son honneur, d’organiser des séances d’hommage pour exprimer notre chagrin, d’évoquer son immense génie poétique et son extrême délicatesse dans la vie de tous les jours. Il est vrai que nous sommes extrêmement affligés pour sa soudaine disparition. Ce soir, notre affliction est encore plus grande parce que Mahmoud Darwich était à la tête de l’équipe qui avait organisé la saison culturelle palestinienne en Belgique. Il avait présidé le comité palestinien Masarat qui avait travaillé main dans la main avec les Belges pour réussir cet événement.
Un récital poétique de Mahmoud Darwich était prévu pour inaugurer ces activités. Il l’avait désiré et le prévoyait avec enthousiasme, mais ses artères avaient failli et ne lui avaient pas permis d’arriver jusqu’à ce jour.Aujourd’hui, s’il avait été avec nous, la joie de Leila Shahid, l’Ambassadrice de la Palestine auprès de l’Union européenne et l’amie du peuple belge, aurait été totale. Depuis un an, elle avait mis tout en œuvre pour que le succès couronne cette saison. S’il avait été avec nous, la joie de Fabienne Verstraeten aurait été totale, elle qui versait de chaudes larmes avec le peuple palestinien chaque fois qu’il encaissait un revers. Elle avait travaillé d’arrache pied pendant toute l’année écoulée afin de construire plus de ponts d’amitié et de collaboration entre les peuples belge et palestinien, concrétisant l’un des grands thèmes chers à la poésie de Darwich, qui ne tiennent compte d’aucune frontière, genre ou nationalité et qui s’adressent à l’être humain avec ses désirs, ses aspirations, ses soucis et ses espoirs, partout où il se trouve.
Je me souviens des derniers jours de Mahmoud Darwich et je me souviens de sa dernière réunion à Ramallah avec le comité Masarat, chez Adila et Akram.
Il était lumineux comme à son habitude, le visage souriant, l’esprit vif, émaillant la réunion de blagues et de rires. Et comme à son habitude, il s’était distingué par la logique de son argumentation, par sa faculté d’écoute et par sa compétence à extraire la substantifique moelle de l’ensemble des idées que proposaient les femmes et les hommes réunis. Je me souviens de sa dernière rencontre avec Mme la Ministre Marie Dominique Simonet. Il était arrivé au rendez-vous avant l’heure prévue, afin de pouvoir l’accueillir en compagnie de Mme Leila Shahid et des membres du comité Masarat. La saison culturelle dont Darwich est absent aujourd’hui, fut le principal sujet de conversation entre le poète et la ministre, venue à Ramallah pour annoncer officiellement l’adoption de cette manifestation culturelle et pour nous faire part de la solidarité du peuple belge avec la Palestine et son peuple. Ce jour-là, Mahmoud Darwich rayonnait de vivacité et de charisme, comme à son habitude.
Je me souviens de son dernier récital poétique au Palais de la Culture à Ramallah, quarante jours avant sa disparition, à l’occasion de la célébration par la ville du centenaire de la première mairie. À l’entrée de Mahmoud dans la salle, la foule innombrable s’était levée comme un seul homme en hommage au poète qui avait modelé la conscience palestinienne pendant cinq décennies, l’exprimant de la meilleure façon qui soit, au poète qui avait magnifié de manière exceptionnelle l’identité nationale et culturelle du peuple palestinien. Au cours de ce récital, Mahmoud Darwich avait prouvé qu’il était sans cesse capable de dépasser son acquis poétique, d’étonner le public avec de magnifiques poèmes qui exprimaient de manière originale son expérience de vie, en élargissant l’espace de la vision, en multipliant les possibles, en recourant à l’humour qui attire l’attention sur notre vulnérabilité et renouvelle notre sensation de vie. Dans les derniers poèmes qu’il avait lus devant une foule innombrable, nous avons pu déceler de précieuses innovations dans son parcours poétique, telles le recours à certains aspects autobiographiques et à quelques souvenirs qui enrichissent ses liens avec l’espace palestinien, une réflexion profonde sur la mort et sur la vie, des questions qui ouvrent la voie à la méditation à partir les détails les plus infimes de la vie quotidienne pour un envol vers un espace infini. Au cours de ce récital, Mahmoud Darwich avait brillé, comme à son habitude, surprenant les penchants esthétiques de son auditoire, relevant toujours un peu plus l’espace qu’occupait la littérature en général et la poésie en particulier dans la vie des gens. Au cours de ce récital, la place de Darwich s’est trouvé de nouveau raffermie dans le coeur des gens, comme s’est confirmé de nouveau sa présence comme symbole, faisant battre à l’unisson nos sentiments, les exaltant dans un moment unique et rare d’élévation qui nous permet de transcender la misère, la confusion et l’indétermination de notre vie, de regarder l’avenir avec un tant soit peu d’optimisme et d’espérance.
Pourtant, la disparition soudaine de Mahmoud Darwich s’est abattue sur nous comme une véritable catastrophe au mauvais moment. Mahmoud est décédé. Il avait honoré la ville de Ramallah en y résidant, lorsque les autorités de l’occupation israélienne lui avaient concédé un retour tronqué. Mahmoud est décédé. Il ne montera plus les marches de l’immeuble Sakakini où était son bureau. Il ne feuillettera plus les journaux dans le bureau qui l’avait accueilli pendant des années. Il ne boira plus du café en achevant un travail pour la revue « al-Karmel » qu’il dirigeait. Il ne répondra plus aux appels téléphoniques, il ne recevra plus ses amis avec affabilité et courtoisie avant de s’engager avec eux dans de longues conversations sur notre situation actuelle et sur nos peines. Il avait alors du temps pour parler de poésie, de romans, de nouvelles ou des dernières parutions. Il avait alors du temps pour l’humour, car Mahmoud était le maître des plaisanteries, le prince de la verve. Il avait alors du temps pour le rire et ses yeux brillaient derrière ses lunettes, son visage s’illuminait. Hélas, cette savoureuse simplicité n’est plus possible. Désormais, elle n’est plus possible, cette promenade quotidienne qu’il faisait en solitaire ou en compagnie de ses amis, dans les rues de son quartier, obéissant aux conseils des médecins qui lui avaient prescrit la marche pour éviter l’incident cardiaque. Il ne lui est plus possible de contempler les arbres, les femmes ou le linge sur les balcons. Il ne lui est plus possible de voir le soleil tomber à l’heure du couchant du côté de son village natal, de jouir de la brise qui se lève doucement, malgré la colonie étrangère qui pèse de tout son poids sur le sommet de la montagne, à proximité.
Avec sa disparition bouleversante, nous avons perdu une immense figure poétique et humaine. Nombreux sont ceux qui le regretteront : parents, amis, intellectuels et gens ordinaires. De nombreuses villes le regretteront aussi : Haïfa, Ramallah, Amman, Beyrouth, Damas, Tunis, le Caire, Alger, Casablanca, ainsi que de nombreuses villes arabes ou étrangères où il s’était promené, dans leurs cafés, il s’était assis, dans leurs salles, il avait lu ses poèmes. Il manquera à Jérusalem sur laquelle il avait tant écrit sans avoir l’opportunité d’y vivre. Il manquera au village d’al-Birweh, dont les terres confisquées et les décombres languiront pour cet enfant du pays qui avait immortalisé son nom et celui de la Palestine dans de nombreux poèmes qui passeront l’épreuve du temps. Il manquera aussi à la ville de Bruxelles qui l’avait tant attendu. Il nous manquera à tous, sa disparition cruelle marquera un grand vide au fond de nous. "»
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Mais ce soir-là, tel le Christ Ressuscité par la ferveur de ses fidèles, le Poète était revenu, dans toute la plénitude de son âme, pour marquer le sceau de son verbe immortel au fond de chacun de nous… Il était là, plus vivant que les vivants dans le récital palestinien du fabuleux trio Joubran. Ces trois frères, Samir, Wissam et Adnan, avec leur magistrale improvisation sur leurs 3 oud (luths) exprimant toute la profondeur de l’extase et de la douceur. Leur musique dit à elle seule, ce que ni les mots, ni les gestes ne peuvent dire. Il faut absolument les voir, écouter et découvrir la virtuosité magique avec laquelle leurs doigts agiles font parler rire et pleurer leur instrument, pendant que derrière eux l’ image géante de Mahmoud Darwich avec sa voix puissante rythmait la musique avec son verbe toujours vivant, présent comme s’ il était là tout près de nous, de vous, de ce monde qu’ il n’ a pas, qu’ il ne quittera jamais, aussi longtemps que soufflera la palpitation d’ existence des peuples libres… et justes !
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Cependant, je me dois d’ajouter que j’ai regretté l’absence de José Saramago, écrivain portugais, Prix Nobel de littérature, ami de Mahmoud Darwich et l’un des plus courageux défenseurs de la cause palestinienne. Sachant que la reconnaissance du talent, de la probité humaine et intellectuelle d’un écrivain, ne se mesure pas aux nombres de ses invitations aux manifestations culturelles dans le monde, Saramago demeure ce qu’il est : un grandiose écrivain et un JUSTE que Mahmoud Darwich et la Palestine ont déjà reconnu comme un des leurs.
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Mais encore, j’ai plus déploré et condamné la défection des ambassadeurs arabes accrédités en Belgique en ce jour d’inauguration officielle de MASARAT-PALESTINE en présence du Premier Ministre palestinien Salam Fayyad ! Cette absence de solidarité des pays arabes avec le peuple palestinien m’a attristée… sans trop m’étonner dans le fond. Toutefois, comme l’a dit un jour, José Saramago : « sans eux la Palestine a déjà résisté 60 ans et résistera 60 années de plus s’il le faut …»
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A suivre, demain publication des photos...
Lien du site"MASARAT PALESTINE": http://www.masarat.be/publications/revue-ah.html
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* http://alaidi.blogspot.com/ Adila Laïdi–Hanieh : essayiste, et théoricienne de l’art et de la culture en Palestine et au Moyen-Orient, ancienne directrice du Khalil Sakakini Culturel Center à Ramallah, et actuellement professeur en pensée arabe et contemporaine à l’Université de Bir Zeit.(Palestine). Elle coédite avec la revue ah ! le numéro "Palestine. Rien ne nous manque ici." Ouvrage collectif, publié sous sa direction - Revue ah ! (Bruxelles) & Les éditions Cercle d’art (Paris)
*Catherine David est historienne de l’art, spécialiste de l’art du Moyen-Orient, curatrice et directrice artistique de manifestations et institutions telles que La Documenta X de Kassel, la Galerie Nationale du Jeu de Paume, Witte de With, le Festival d’Automne de Paris
*Mahmoud Shukair est né en 1940 à Jerusalem. Il est l’auteur de nombreux recueils de nouvelles et de livres pour enfants. La Revue d’Etudes Palestiniennes a publié quelques-unes des ses nouvelles. A lire absolument son dernier livre : " Ma cousine Condoleeza Rice et autres nouvelles » (Paris- Actes Sud/Sindbad)
*Elias Sanbar : né à Haïfa en 1947, est âgé d’un an quand sa famille est chassée de Palestine au moment de la création d’Israël (1948).Historien, essayiste, poète et militant de la cause palestinienne. En 1981, Elias Sanbar fonde à Paris, La Revue d’études palestiniennes dont il est le rédacteur en chef. Il a aussi participé à des travaux de cinéma, traduit des poèmes en français (notamment ceux de Mahmoud Darwich) et écrit plusieurs essais.
*Elias Khoury: né à Beyrouth en 1948, est un libanais romancier, dramaturge et critique. Il a publié près de dix romans, qui ont été traduits dans plusieurs langues étrangères, ainsi que de nombreux ouvrages de critiques littéraires. Il a aussi écrit trois pièces de théâtre. Il est actuellement rédacteur en chef du journal Al-Mulhaq, le supplément hebdomadaire du quotidien libanais Al-Nahar et est un intellectuel de renommée internationale. (http://fr.wikipedia.org/wiki/Elias_Khoury)
*Baha Boukhari, dessinateur satirique palestinien né en 1954 à Jérusalem
*Pierre Kroll : est un dessinateur et caricaturiste Belge né en 1958 à Gwaka en République démocratique du Congo
*Plantu: dessinateur satirique français, de son vrai nom, Jean Plantureux né en1951 à Paris